Les deux ou trois jours avant un ultra trail

A force de faire des courses, on finit par banaliser un peu la distance. Il y a dix ou quinze ans, quand je courais un 50 kms, c’était mon objectif de l’année, et j’organisais les autres courses (des 10 ou 20 kms) autour.

Aujourd’hui mon objectif de l’année se situe aux alentours de 100/120 kms, j’espère 170 kms pour 2020 si cette fois-ci on a la chance d’être tirés au sort pour l’UTMB, et donc les courses pour préparer cet objectif sont des courses de 50 kms, voire 100 kms mais avec un peu moins de dénivelé que les courses de l’UTMB.

Dans deux jours, on prend le départ de l’Xtrail de Corrèze, 103 kms, 4200 mètres de dénivelé.

Alors je pèse mes mots, je les choisis bien, pour écrire la suite. J’entends déjà les mauvaises langues (aujourd’hui avec les réseaux sociaux on emploie des termes moins jolis, mais je reste un peu ancien style, j’aime bien le terme « mauvaises langues »), dire « oh mais quelle prétentieuse celle-là ! »

Mais il n’y a aucune prétention dans ce que je vais dire, juste de la logique. Quand j’ai couru mon premier ultra, la CCC, qui a été un échec d’ailleurs, je n’ai pas dormi les 3 jours avant. J’ai « double checké », » triple checké », toutes mes affaires des jours avant, le jour du départ de la course j’avais l’estomac noué, la tête en vrac, les boyaux encore plus. Bref c’était pas la fête !

Ensuite on s’adapte, on modifie l’entrainement pour pouvoir courir des courses de plus en plus longues, et ce qui était auparavant la « norme », à savoir des courses de 50 kms, devient au fil du temps des courses de 100 kms.

Le dernier départ que j’ai failli prendre pour un ultra, l’UTCAM, l’ultra du Mercantour, 110 kms pour 7000 de D+ quand même, je suis rentrée en avion de Bordeaux la veille du départ à 23h (il faut savoir que Bordeaux est une ville qui a un succès fou, prendre l’avion à Bordeaux, c’est des heures de stress tellement il y a de monde), j’avais passé les semaines précédent la course à déménager, j’ai porté des kilos de cartons, des kilos de BD, des kilos d’assiettes et de vaisselles.

3 jours avant le départ, la sanction, lumbago, et malgré ça j’y croyais encore, donc j’ai avalé des kilos d’anti-inflammatoires !

Evidemment je n’ai pas fait la course.

Bref dans ma tête je partais pour un 15 kms, mais quelle erreur. Et je reprécise que je ne sous estime pas les courses de 15 kms. Mes plus mauvais souvenirs de course sont des 30 kms que j’ai trouvés beaucoup plus difficiles que certains 100.

Donc aujourd’hui, retour à la case départ, j’ai l’impression de partir pour mon premier ultra, le stress et l’angoisse qui vont avec.

J’ai eu un mal de chien à me défaire de ce lumbago, je ne suis pas du genre patient, donc dès que ça allait mieux, je recourais, j’avais l’impression qu’au bout de deux jours ça allait mieux en fait, je ne suis vraiment, mais vraiment pas patiente du tout. Du coup, je recourais, et je me rebloquais, ce va et vient a duré au moins 2 mois, juin et juillet. J’ai quand même réussi à m’entrainer un peu entre deux blocages.

En août, c’étaient les vacances à Annecy, hors de question que je ne profite pas à fond de toutes ces belles montagnes, le dos a tenu, à peu près.

Mais après le déménagement, il y a le réemmenagement, c’est un peu comme quand on fait les courses (alimentaires, pas à pied), on met dans le caddie, on sort du caddie, on remet dans le caddie, on ressort du caddie et pour finir on ressort de la voiture (oui je sais aujourd’hui il y a des façons plus modernes de faire les courses). Avec les cartons c’est la même chose, et c’est reparti pour un tour, on se penche on soulève le carton, on se redresse, et…. voilà.

Bon, rien à voir avec le lumbago de juin. Là j’ai juste le dos qui tire un peu, ça va le faire. Si je ne finis pas la course, j’espère ne pas avoir à dire que c’est à cause du dos.

Et pour couronner le tout, parce que en ce moment j’ai vraiment l’impression que je foire absolument tout ce que je fais (pour l’instant je le prends encore avec humour, on verra à la fin de la course), j’ai une maudite douleur à la cuisse depuis deux semaines.

Normal, quand on ne court plus beaucoup et qu’on reprend un entrainement normal, les muscles souffrent un peu.

Donc là aussi retour à la case départ, on ne fait plus rien et on attend que la douleur passe. Pour être honnête, la première semaine j’ai appliqué la tactique habituelle, dès que je ne sentais plus trop la douleur, je repartais. Forcément une journée ce n’est pas suffisant pour se débarrasser d’une petite élongation, je le sais pourtant, mais bon…. faire et refaire les mêmes erreurs, j’ai l’habitude.

Physiquement je ne suis pas au top, alors j’essaie de mettre toutes les chances de mon côté avec l’alimentation et l’hydratation.

En course, on perd des tonnes de sels minéraux, en Corrèze on annonce 30 degrés, ça va être terrible, je me prépare à des moments difficiles.

La sanction est immédiate si on perd trop de ces précieux sels minéraux, les crampes surgissent. Donc je fais le plein de sels minéraux avant la course. La Saint Yorre est l’une des eaux les plus riches en sels minéraux que je connaisse. C’est gustativement pas très bon, mais deux jours avant la course c’est un allié précieux, et durant la course également. Même si boire de la Saint Yorre quand on est fatiguée au bout de 15 heures de course, et écoeurée par la nourriture relève de l’exploit.

La rozana est pas mal aussi. Pendant la course, je continue à faire le plein de sels minéraux qui s’évacuent très vite avec la transpiration. Saint Yorre aux ravitos, comprimés de sportenine dans mon sac, et boisson énergisante dans l’une de mes deux flasques, j’alterne eau nature et boisson énergisante.

L’avantage de ces boissons est double, elles permettent un apport constant en sels minéraux et quand on ne peut presque plus s’alimenter (fatigue, problèmes intestinaux sur les très longues distances), elles compensent quand même un peu le manque de nourriture.

Je bois, je bois, je bois. Quand on est une fille il vaut mieux avoir des toilettes pas trop loin les jours avant la course. De l’eau, évidemment, la bière et le rosé restent sagement dans le réfrigérateur.

Pourquoi boire autant avant la course ? Pour hydrater les tendons et les muscles avant la course, si on part déjà avec un déficit d’hydratation, les tendons souffrent.

Pour l’alimentation, je ne change pas vraiment. Des oeufs, de la volaille, des féculents, mais pas de gluten, plutôt du riz, je limite le sucre au maximum, la veille de la course je ne mange pas trop de fibres.

J’essaie de bien dormir les deux ou trois nuits avant, pour préparer une nuit à courir sans dormir. Pour bien dormir je n’ai rien trouvé de mieux que de manger léger le soir. J’évite tout ce qui est lourd à digérer, pas de viande, pas de sodas, pas de pain, pas ou peu de féculent, je les mange le midi.

Je ne fais pas ça trois semaines avant, ni même une semaine, mais c’est important les deux ou trois jours qui précèdent une course.

J’étudie le parcours, je mémorise les ravitos, le temps qu’il me faut pour y arriver, les flasques dont j’ai besoin pour aller entre deux ravitos, il va faire très chaud, je ne veux pas revivre la transaubrac où j’ai fait des kilomètres sans eau.

J’essaie de travailler le mental. Alors évidemment, en ce moment dans mon cas personnel, on va dire que ce n’est quand même pas facile 🙂 Il faut commencer par faire abstraction de tous les bobos et se concentrer sur les points positifs… je les cherche j’ai encore deux jours pour les trouver 🙂 Pour l’instant je ne peux pas m’empêcher de me dire que sur une échelle de 0 à 10 de chance d’y arriver, je suis à 0,5. Pourquoi 0,5 ? Parce qu’à 0 je ne prendrai pas le départ.

Et évidemment, je ne cours pas, ou peu, là en l’occurrence pas du tout pour que mon quadriceps ait toutes les chances d’être en forme le jour J.

Je ne sais pas si ça va suffire, mais c’est aussi pour ça que j’aime tant ces longues distances, on ne sait jamais comment ça va se passer, comment le corps et surtout la tête vont réagir.

La seule chose que je sais, c’est que malgré tout, j’ai vraiment envie de faire cette course, que quand je serai sur la ligne de départ, je trouverai la motivation pour aller au bout, parce que j’ai vraiment très envie de franchir la ligne d’arrivée.

et puis franchement, il faut quand même qu’à un moment donné la poisse me quitte et aille sur quelqu’un d’autre 🙂

 

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