Travailler son mental

Le sujet n’est pas facile, parce que très personnel, j’ai mis pas mal de temps avant de réaliser qu’une course à pied n’est pas uniquement une question de forme physique. On pense à s’entraîner physiquement, on pense à soigner son alimentation, et le mental ? Cette question du « mental » ne concerne pas seulement les sportifs, mais tout le monde dans la vie de tous les jours, d’où la complexité du sujet, parce qu’il est hors de question de donner des leçons, mais juste de tenter d’expliquer comment on peut gérer une course de plus de 100 kms.

Je pense que le gros du travail se fait avant la course, il faut accepter quelques postulats de base :

  • La première chose à faire, et c’est celle qui parait le plus stupide et pourtant c’est tellement important, il faut positiver. Positiver et avoir confiance en soi et dans le travail qu’on a effectué pour se préparer. Quand je relis mon compte rendu de ma 1ére CCC, celle où je me suis arrêtée à 72 kms, je suis incroyablement négative. Le pire c’est que je l’étais déjà avant même de partir. J’appréhendais de courir la nuit, de courir seule (alors que j’aime courir seule) Comment peut-on espérer réussir quelque chose si dans un coin de sa tête on est persuadée qu’on n’y arrivera pas ? C’est mission impossible en fait.

  • Positiver ne veut pas dire « neuneu », c’est génial, tout est beau, facile, on part la fleur au fusil. Il va forcement y avoir des moments difficiles à gérer. On ne peut pas être au top pendant 24 heures et courir frais comme un gardon à 4 heures du matin. Il est donc nécessaire d’anticiper ces moments là, de les « visualiser » pour faire en sorte que le moment venu, ce ne soit pas une surprise. L’expérience à ce moment là joue un rôle important. J’essaie de me rappeler les moments où j’ai connu les mêmes situations, et comment généralement je m’en suis bien sortie. Ce travail là,  je le fais avant la course, de façon à pouvoir visualiser tout ça pendant. Parce qu’il y a le moment où on se sent au fond du trou, et invariablement il y a le moment d’après, où on recommence à se sentir bien. Et durant les courses, il y a toujours un « après », comme dans la vie en fait, il faut essayer de faire en sorte de s’en rappeler le moment venu, il faut donc gommer les courses où on n’a pas réussi à franchir le moment difficile, pour se focaliser sur celles durant lesquelles ça s’est bien passé.

 

  • Il faut s’engager. Après mon 1er échec sur la CCC, j’ai beaucoup gambergé, je me suis dit, « tu as été trop prétentieuse de penser que tu pouvais y arriver, t’as pas le niveau ». Après j’ai cherché des excuses, c’est la seconde phase, on essaie de se dire qu’on n’est pas responsable de son échec et généralement on s’arrête là. C’est tellement plus confortable de se déresponsabiliser en se disant « je ne pouvais pas continuer, j’étais malade, c’est pas de ma faute », je l’ai dit… Et c’est vrai que j’étais malade, mais en y réfléchissant bien, ce serait surement passé, je n’aurais pas vomi pendant 30 kms, si j’avais eu le courage de continuer, mais je ne l’ai pas eu. Etant donné que je ne comptais pas rester sur un échec j’ai cherché des solutions pour gérer ce genre de situations et je suis tombée sur une vidéo sponsorisée par Columbia, extrêmement intéressante qui contenait des témoignages de grands sportifs spécialistes de l’ultra. Et l’un d’entre eux parlait d’engagement, de contrat moral signé avant la course. Il expliquait qu’il s’engageait vis à vis de lui même à faire une course de 160 kms, pas 100, pas 120 mais 160. Ca parait tout bête mais c’est efficace, et je m’en suis servie durant ma 2ème CCC, je suis partie en me disant « tu pars pour 101 kms, si au 60ème t’en peux plus, rappelle toi que tu as signé pour 101, c’est hors de question de s’arrêter à 60 ». Alors je ne prône pas le masochisme, si on a une entorse, une contracture, évidemment on s’arrête. Je parle juste de moment où on a « l’impression » de ne plus en pouvoir.

Pendant la course :

  • J’essaie d’appliquer tout ce que j’ai dit plus haut. Je pars en me disant que je vais y arriver, que j’ai choisi d’être là que personne ne m’a forcée, je profite du paysage, je profite de la chance que j’ai d’être là…et je pars pour la distance annoncée. J’ai appliqué ce contrat, durant ma 2ème CCC et ça a fonctionné. Arrivée à Trient, l’endroit maudit où j’avais jeté l’éponge l’année d’avant, je n’ai pas pensé une seconde à arrêter, dans ma tête j’avais encore 30 kms à faire.

 

  • J’ai compris également assez tardivement (on ne cesse jamais d’apprendre finalement) l’importance de la nourriture sur le mental. C’est basique, je ne vais pas trop m’étendre là dessus sinon c’est parti pour 5 pages de plus, mais le cerveau ne peut pas fonctionner correctement si on a faim ou soif, alors je m’attache à manger régulièrement, toutes les 20 minutes je m’alimente, au bout de 50 kms tout m’écoeure alors je me force à manger.

C’est compliqué, mais c’est aussi pour ça que j’aime courir, chaque course en plus d’être un plaisir, le plaisir de se retrouver dans des endroits superbes, est un peu un défi 🙂

Tête de la Tronche

 

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